mercredi 4 décembre 2013

Passeports belges : accusations de « marché irrégulier »

Belga
Oberthur Technologies attaque l’Etat belge. Le 26 juillet dernier, la firme française qui produit les passeports belges depuis dix ans avait perdu un juteux contrat de 40 millions d’euros.


C’est la société belge Zetes associée à un partenaire finlandais (Gemalto Oy) qui avait mis le grappin sur la production, la personnalisation et la livraison du passeport électronique jugé le plus sûr au monde. Quelque 440.000 documents sont à concevoir sur une base annuelle, et ce durant cinq ans. Début du contrat? Le 1er mai prochain.

Mais aujourd’hui, le producteur évincé conteste la légalité du marché public. Le recours en suspension introduit devant le Conseil d’Etat a été jugé irrecevable. Dès lors, les avocats d’Oberthur montent dans les tours. Ils sollicitent l’annulation expresse du marché conclu l’été dernier. Ce mercredi matin, au tribunal de première instance de Bruxelles, l’affaire a ainsi été plaidée devant une juge des référés. Le verdict judiciaire est attendu dans le mois.

Le marché public controversé avait été lancé à la Noël 2009. La procédure avait duré près de quatre ans. En bout de course, face au comité de sélection du SPF Affaires étrangères, l’offre de l’association momentanée Zetes/Gemalto l’avait emporté aux points face à Oberthur Technologies: 87,39/100 contre 85,39/100.

En référé, la Française Oberthur a critiqué ouvertement le «favoritisme» dont aurait bénéficié son concurrent. «Il est clair que l’Etat belge a voulu avantager Zetes», estime l’avocat de la firme Oberthur, Michaël Pilcer. La procédure aurait été entachée de «graves irrégularités», «qui en affectent la légalité». De quoi s’agit-il?

1. Oberthur pointe le décalage d’un jour dans la remise de la dernière offre. Le 29 avril 2013 pour Oberthur, le lendemain pour son concurrent. «Ce qui a pu permettre à Zetes de baisser son prix.» Pour l’avocat de l’Etat, «il est scandaleux de suggérer que nous ayons pu divulguer à l’un des concurrents les conditions proposées par l’autre. Les deux offres ont été ouvertes le même jour, le 2 mai.»

2. Pour Oberthur, l’attitude de Zetes est «particulièrement floue» en ce qui concerne la livraison des passeports, «alors que nous nous conformons aux exigences du cahier des charges». Oberthur recourt ainsi à une entreprise de sécurité, «ce qui augmente son prix.»

3. Les audits de sécurité auraient été effectués chez Oberthur au moment où ses installations de Templemars (Nord-Pas-de-Calais) étaient en travaux. Résultat? Zéro pointé sur 28 critères, entrainant la perte des deux points qui font la différence.

En marge du procès, Zetes confie qu’à ses yeux, «Oberthur veut gagner du temps et cherche à occulter un écart de prix bien trop important». Sur ce critère parmi d’autres, Zetes/Gemalto avait recueilli la note maximale de 40/40, là où Oberthur calait à 37,90. «Pendant des années, assène-t-on chez Zetes, la Belgique a payé 30 euros pour des passeports qui en valaient 13. Le surcoût annuel pour les caisses de l’Etat se chiffre dès lors à 7 ou 8 millions d’euros.»

D’autres développements relatifs à cette étonnante saga des passeports dans Marianne ce samedi 7 décembre.

Philippe Engels

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