samedi 27 septembre 2014

Comme la fumée, les paroles s’envolent, mais les écrits restent...

(c) Belga
Ainsi donc, la porte-parole de l’université catholique de Louvain (UCL), Isabelle Decoster, «dément formellement», ce samedi, à notre confrère Frédéric Soumois du Soir, avoir tenu les propos que nous lui attribuons en marge d’un article consacré au financement de l’Institut de Duve par l’industrie du tabac. Le hic, c’est que cette réponse nous a été formulée par Isabelle Decoster par écrit, dans un courriel du 13 décembre 2013 (notre enquête, soutenue par le Fonds pour le journalisme, s’est échelonnée sur plus d’un an). Nous nous permettons donc de reproduire ce courriel ci-dessous, afin de dissiper tout malentendu. D’autant que nous l’avions transmis à notre confrère (qui nous avait avertis du «démenti») bien avant le bouclage du Soir.

Qu’une porte-parole officielle d’une des plus prestigieuses universités du pays démente ses propres propos, tenus par écrit à un journaliste, est pour le moins surprenant. Pour ne pas dire consternant. A moins qu’il ne s’agisse d’allumer un contrefeu. De susciter une fausse polémique en vue de tenter de décrédibiliser un dossier qui vraisemblablement dérange l’UCL, puisque plusieurs de ses scientifiques de tout premier plan – Michel Symann, Marcel Roberfroid, Christian de Duve – sont cités dans notre enquête pour les liens très discrets qu’ils ont entretenus avec l’industrie du tabac au cours des deux dernières décennies du 20e siècle.

La première réponse d’Isabelle Decoster était la suivante:

«En ce qui concerne votre question, selon l’administration de la recherche de l’UCL, il n’y aurait pas de recherches financées aujourd’hui par l’industrie du tabac.»

L’usage du conditionnel nous a surpris, ce qui a fait l’objet d’une question supplémentaire. Dont voici la réponse citée dans notre article:

Sujet :     RE: de Duve
Date :     Fri, 13 Dec 2013 11:18:36 +0000
De :     Isabelle Decoster <isabelle.decoster@uclouvain.be>
Pour :     David Leloup <david.leloup@gmail.com>

Bonjour,

Selon les données détenues par l’administration de la recherche de l’UCL, il n’y a aucune recherche financée par l’industrie du tabac. Ceci étant, les professeurs bénéficiant de la liberté académique, toutes les informations liées à leurs recherches ne transitent pas nécessairement par l’administration de la recherche, d’où l’utilisation du conditionnel.

Cordialement,

Isabelle Decoster
Attachée de presse UCL
isabelle.decoster@uclouvain.be
http://www.uclouvain.be/presse

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UCL - Presse et communication
1 place de l’Université,
bte L0.01.08 -1348 Louvain-la-Neuve

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Une chose est sûre, la mauvaise foi des autorités n’est pas généralisée à l’UCL, comme en atteste par exemple ce tweet enthousiaste du climatologue Jean-Pascal van Ypersele, vice-président du GIEC et membre de l’Académie royale de Belgique:

vendredi 26 septembre 2014

L’Institut du prix Nobel Christian de Duve financé pendant 10 ans par l’industrie du tabac

Le prix Nobel belge Christian de Duve (ici en 1995) a accepté que l'industrie du tabac sponsorise son institut de recherche pendant dix ans. (c) Belga
Le prestigieux Institut de Duve de l’UCL, fondé et dirigé par feu le prix Nobel de physiologie Christian de Duve, a été sponsorisé pendant dix ans par le lobby belge du tabac. Au même moment, Christian de Duve était expert anti-cancer pour la Commission européenne. Et donc en conflit d’intérêts.

Entre 1983 et 1992, la Fédération belgo-luxembourgeoise des industries du tabac (Fedetab) a versé plus de 1,2 million de francs belges à l’Institut scientifique créé par le prix Nobel de physiologie Christian de Duve. «Il s’agissait de versements annuels d’un montant de 100.000 francs belges les premières années, et qui a atteint 150.000 francs en bout de course», détaille Emile Vanschaftingen, l’actuel directeur de l’Institut de Duve, confirmant ainsi un document de 1983 exhumé par M... Belgique des archives du tabac. Il précise qu’il s’agissait de dons sans contrepartie: «La nature de la recherche réalisée à l’Institut n’a pas été affectée par ce sponsoring.»

«Aujourd’hui on refuserait»

On ignore qui de la Fedetab ou de Christian de Duve a approché l’autre, de même que les raisons pour lesquelles ce sponsoring s’est achevé fin 1992. Emile Vanschaftingen concède que c’était «un joli coup de l’industrie du tabac d’associer ainsi son image à celle d’un prix Nobel». Une façon habile de récupérer son prestige et sa notoriété. «Aujourd’hui, on refuserait un tel sponsoring pour éviter tout amalgame, poursuit-il. Avec le recul et tout ce qu’on a depuis appris sur cette industrie, on ne pourrait plus penser qu’un tel financement est réalisé de bonne foi, sans intéressement.»

En avril 1986, Christian de Duve a été nommé , par la Commission européenne, au sein d’un groupe de douze experts chargés de la conseiller sur la lutte contre le cancer. «Bien que d’autres formes et causes de cancer sont mentionnées, le tabac est la priorité absolue», indique une note interne du 2 juin 1986 de la British American Tobacco consacrée à cette initiative européenne anti-cancer. Le sponsoring de la Fedetab, qui a donc encore duré six ans après la nomination de Christian de Duve au sein de ce groupe d’experts, ne plaçait-il pas de facto le prix Nobel en situation de conflit d’intérêts?

Liberté académique

Selon les données détenues par l’administration de la recherche de l’UCL, il n’y aurait actuellement plus d’études scientifiques financées par l’industrie du tabac. Mais le conditionnel est de mise: «Les professeurs bénéficiant de la liberté académique, toutes les informations liées à leurs recherches ne transitent pas nécessairement par l’administration », précise Isabelle Decoster, porte-parole de l’UCL.

A l’université de Liège, ce serait «impossible aujourd'hui», selon le porte-parole de l’Ulg Didier Moreau, qui explique que depuis «une petite dizaine d'années, tous les contrats de sponsoring de la recherche passent par le rectorat pour signature, via un logiciel de gestion centralisateur développé par la firme allemande SAP».

David Leloup


Ce vendredi, M... Belgique publie une longue enquête soutenue par le Fonds pour le journalisme sur les scientifiques belges financés par l’industrie du tabac. Les documents internes des cigarettiers révèlent comment ils ont financé, durant le dernier quart du 20e siècle, des scientifiques belges pour nier ou minimiser l’impact de la cigarette et du tabagisme passif sur la santé, mais aussi pour infiltrer les sphères scientifique et gouvernementale du Royaume, réaliser de la veille législative «vitale» pour son succès financier, ou encore gagner de la respectabilité en associant son image à celle de scientifiques prestigieux. Et tout cela dans le plus grand secret.

jeudi 11 septembre 2014

Pas de transaction pénale en cours pour Luciano D’Onofrio


Le Parquet de Liège dément être en négociation avec les avocats de Luciano D’Onofrio en vue d’éteindre les poursuites à son égard, contre le paiement d’une amende, dans le tentaculaire dossier de blanchiment et de transferts suspects au Standard de Liège.

Contacté par M… Belgique suite à une information de la RTBF, le substitut du procureur du roi de Liège, Frédéric Demonceau, «dément avoir entamé la moindre négociation avec Monsieur D’Onofrio ou ses conseils en vue d’aboutir à une transaction pénale» dans le dossier «Standard», dont l’instruction s’est déroulée à Liège d’avril 2004 à septembre 2011.

Hier, dans des sujets diffusés dans ses JT de 13h et 19h30 consacrés au renvoi en correctionnelle de Luciano D’Onofrio dans ce dossier pénal, la RTBF affirmait que «la justice a entamé avec lui des négociations, comme avec d’autres inculpés». Il n’en est donc rien, du moins en ce qui concerne Luciano D'Onofrio.

Ordonnance du 30 juin 2014

Dans son ordonnance du 30 juin dernier, la chambre du conseil de Liège avait renvoyé l’ex-homme fort du Standard, ainsi que 26 autres inculpés, devant le tribunal correctionnel pour des faits de blanchiment, organisation criminelle, faux et usage de faux. Une information relayée par la DH à l’époque et développée, hier, en manchette du journal barrée d’un bandeau «exclusif».

Pour rappel, ce dossier titanesque comporte un volet «blanchiment» dans lequel Luciano D’Onofrio est suspecté d’avoir blanchi 1,7 millions d’euros lors du sauvetage du Standard fin des années 1990, et un volet «transferts suspects» où une flopée de dirigeants de clubs, d’agents et de joueurs sont sur la sellette pour avoir perçu ou versé des compléments de salaires occultes.

Procès en 2016

Luciano D’Onofrio et plusieurs autres inculpés ont interjeté appel contre leur renvoi devant le tribunal correctionnel de Liège par la chambre du conseil. La chambre des mises en accusation devra statuer sur cet appel dans les mois qui viennent, mais sa décision pourra encore faire l’objet d’un éventuel recours devant la cour de cassation à Bruxelles. Dans ce cas, le procès ne devrait pas s’ouvrir avant début 2016 au plus tôt.

Jusqu'ici, seuls deux inculpés, Pierre François et Michel Preud'homme, ont transigé avec le Parquet dans ce dossier. La justice liégeoise reprochait à l’ex-directeur général du Standard d’avoir signé quatre conventions bidon pour payer des compléments de salaire au noir à trois joueurs (Ivica Dragutinovic, Miljenko Mumlek et Sambegou Bangoura). Pierre François a payé 18.990 euros pour échapper à un procès.

8.990 euros pour Preud'homme

Quant à l’actuel entraîneur du FC Bruges, Michel Preud’homme, il était poursuivi pour avoir fermé les yeux, quand il était directeur technique du Standard, sur le paiement d’une «prime à la signature» au noir lors du transfert de Micky Mumlek en 2003. Il a payé 8.990 euros pour éteindre les poursuites à son égard.

Selon nos informations, trois autres inculpés sont en train de négocier leur impunité pénale avec le Parquet. Il s'agirait de Michel Verschueren, du RSC Anderlecht et du Standard de Liège.

David Leloup

Cet article se prolonge sur Twitter.