mercredi 26 février 2014

Le labyrinthe qui menait à «El Chapo»

Regardez ce document. Il est tout simplement exceptionnel. Il indique à quel point le cartel mexicain de Sinaloa s’est bâti un empire. Une véritable multinationale du crime, contrôlant le commerce mondial de la drogue et dictant sa loi aux Etats. Ses ramifications débouchent sur une incroyable toile d’araignée, reliant des trafiquants et des gangs organisés comme une armée. 

Au cœur du dispositif, il suffit de zoomer habilement pour voir apparaître un nom situé à l’intersection de toutes les branches importantes du cartel : celui de Joaquin Guzman. Surnommé « El Chapo » (le petit), cet homme dont on ne sait s’il est âgé de 56 ou de 59 ans est le chef jusqu’ici incontesté du cartel de Sinalo. Il a été arrêté ce samedi 22 février, à l’aube, dans une station balnéaire du nord-ouest du Mexique. Lui le successeur de Pablo Escobar. Le petit géant de la drogue.

Les images de son arrestation ont fait le tour du monde. On y voit des soldats mexicains serrer de près El Chapo. Mais il est évident que la capture d’un des clandestins les plus recherchés au monde est l’œuvre des autorités américaines, parmi lesquelles la DEA (police antidrogue) et la CIA (services secrets). Depuis deux ans, le gouvernement américain était en possession de la cartographie détaillée des réseaux contrôlés par Joaquin Guzman. Ce document secret que reproduit Marianne a permis aux Etats-Unis de diriger le Mexique, de gré ou de force, sur les traces du nouvel ennemi mondial n°1.

Le réseau Guzman figure à la page 46 d’une étude réalisée par l’Institut for Defense Analyses (IDA). Pour rappel, cet IDA est « le » think thank du Pentagone. Le principal conseiller du ministère américain de la Défense, en ligne directe avec la Maison blanche. Durant plus de deux ans, des experts ayant traqué les groupements terroristes en Irak ou en Afghanistan se sont efforcés de comprendre les ramifications du cartel de Sinaloa.

Ce document P-4829 date d’avril 2012. Il y est expliqué que « le cartel de Sinaloa est la coalition formée par quelques-uns des plus grands trafiquants de drogue du Mexique, qui opèrent de concert en se protégeant les uns les autres ». Une organisation qui fonctionne à l’image d’une « fédération d’entreprises » et dont les individualités sont « interconnectées » en fonction des liens du sang, du mariage ou d’accords de coopération. Pour remonter jusqu’au maître des narcotrafiquants, se jouant jusqu’ici des forces de sécurité mexicaines au point de laisser enfler les soupçons de corruption, il suffisait en quelque sorte de remonter l’une des six ou sept filières convergeant vers la tête de réseau Joaquin Guzman.

A moins que les enquêteurs américains n’aient bénéficié de précieuses informations émanant de l’un ou l’autre lieutenant du « parrain » Guzman ? Ceci validerait l’hypothèse avancée par l’avocat américain Francis Boyer. Depuis ses bureaux établis en Floride, Boyer défend les victimes françaises d’une gigantesque escroquerie, doublée d’une opération de blanchiment à l’échelle mondiale (lire Marianne des 25 janvier et 1er février). Une arnaque qui aurait été montée par des hommes d’affaires au service du cartel de Sinaloa.

En échange de leur impunité, interroge l’avocat Boyer, ces blanchisseurs auraient-ils aidé les enquêteurs à cueillir de plus gros poissons ? Simple supputation, bien entendu. Ces derniers mois, convient-il d’ajouter, l’étau s’était resserré sur El Chapo suite à l’arrestation conjointe de plusieurs narcotrafiquants repris dans cet organigramme non-exhaustif. L’arrestation du patron ne devrait pas déstabiliser l’édifice. Le bras droit désigné d’El Chapo Guzman se nomme Ismael « El Mayo » Zambada. Comme on l’observera sur la carte de Sinaloa, le n°2 occupe une autre position stratégique.

Philippe Engels

1 commentaire:

  1. L'ex-bras droit d'Elio Di Rupo à la Ville de Mons, Pierre Urbain, a été inculpé en mars 2013 et semble avoir été lié à ce cartel ...

    Il pourrait par ailleurs y avoir eu des contacts entre le cartel de Sinaloa et la CIA.

    Une affaire à suivre ...

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