lundi 27 mai 2013

Un rapport de la CTIF assassine la défense du prince de Croÿ

Le prince Henri de Croÿ-Solre - Belga
EXCLUSIF - Un rapport de la Cellule de traitement des infractions financières, que Marianne s’est procuré, fait des dégâts au procès du prince Henri de Croÿ-Solre. Cette importante affaire, qui se joue actuellement devant la cour d’appel de Bruxelles, s’inscrit dans le dossier des cash companies (sociétés de liquidités), l’une des plus grandes fraudes fiscales présumées de ces dernières décennies.

«Cela signifie pour nous qu’indépendamment de savoir si les fonds prêtés existent ou n’existent pas, si la banque avait ou non la surface financière pour prendre le risque d’accorder ce prêt, il peut être raisonnablement déduit des explications de l’expert Ellis que la motivation de l’opération n’est pas à la base l’obtention d’un prêt mais bien d’utiliser spécifiquement ce mécanisme avec toutes les caractéristiques juridiques propres à une place offshore et au système de Common Law, pour obtenir par le recours à cette construction un avantage fiscal.» Telle est la conclusion, sans appel, de la CTIF (Cellule de traitement des infractions financières), appelée à se pencher sur les rapports d’experts, dont Stephen Ellis, déposés par le prince Henri de Croÿ-Solre, pour mieux assurer sa défense devant la cour d’appel de Bruxelles.

Ce rapport de la CTIF, signé par son patron Jean-Claude Delepière, pourrait in fine s’avérer être une pièce centrale du dossier, à charge du prince de Croÿ et de ses ex-associés. Il est une fois de plus question d’une colossale machine de guerre installée par des financiers de haut vol, afin de mettre au point un système d’évasion fiscale, d’une technicité particulièrement redoutable. L’affaire de la KB Lux, c’est du pudding à côté! Telle est du moins la certitude du parquet et du ministère des Finances, en la personne de son avocate, Me Martine Bourmanne.  

Les Caïmans à la lunette

Et, une fois de plus, il est question de montages financiers via des paradis fiscaux – Luxembourg, îles Caïmans, île de Man – pour échapper à la pression fiscale sur les entreprises en Belgique. En l’occurrence, le dossier de Croÿ fait apparaître un montage avec les îles Caïmans comme base de repli, où se trouve l’Arab Commerce Bank, à l’origine de prêts importants présumés fictifs accordés à des sociétés belges. But de la manœuvre: que lesdites sociétés déduisent de leur base imposable les intérêts liés à ces prêts faramineux, afin de ne pas payer d’impôt.

Le principal prévenu avait été condamné à 3 ans avec sursis par le tribunal correctionnel de Bruxelles, en juin 2012. Or, voici que devant la cour d’appel, ses avocates, Mes Michèle Hirsch et Nathalie Kumps, ont déposé des rapports d’experts qui, après avoir examiné des pièces du dossier, concluent à la légalité des opérations en chaîne de l’équipe de Croÿ.  

«Bien vu!», s’est dit le procureur général, Patrick Carolus, qui a soumis ces rapports d’experts à la CTIF et à d’autres sommités en vue d’obtenir un avis contradictoire. Nous vous avons livré en exclusivité la conclusion de la CTIF. Précisons que celle-ci s’inquiète du fait que des données défavorables au prévenu sont passées à la trappe dans les rapports des experts. Et la CTIF de citer notamment ce qu’écrit un bureau d’experts sollicité pas la défense: « A la demande du client, il n’a pas été tenu compte des mentions ou informations relatives à des litiges fiscaux impliquant le sujet en Europe.»

Mercredi passé, le procureur général et Me Martine Bourmanne sollicitaient l’audition publique du patron de la CTIF, Jean-Claude Delepière, mais la cour s’y est opposée. L’avocate de l’Etat belge a donc demandé la récusation de la présidente Isabelle de Saedeleer, estimant qu’elle avait déjà manifesté sèchement son opinion verbalement, avant de se retirer pour délibérer et de décider de rejeter officiellement l’audition du témoin de l’accusation. Par conséquent, le procès a été interrompu lundi matin.  

Jean-Pierre De Staercke (avec David Leloup)


Télécharger le rapport de la CTIF du 21 mai 2013 (MàJ 28/5/2013) :

 

1 commentaire:

  1. Dans cette affaire, le prince n'est-il pas défendu par maître Thierry Afschrift ? Ce dernier n'aime pas les délateurs :

    http://www.irefeurope.org/content/la-nouvelle-%C3%A8re-des-d%C3%A9lateurs

    La nouvelle ère des délateurs (Article rédigé par Thierry Afschrift le 06 Jan 2011)

    Elio di Rupo a déclaré la même chose il y a quelques années en s'opposant à une loi belge au sujet des "repentis" (il ne voulait pas d'une société de "corbeaux"). Je me demande d'ailleurs si son frère Franco (pas celui de la fausse monnaie, l'autre ...) n'a pas été défendu par Thierry Afschrift aussi.



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