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Reconverti en peintre
paysagiste carolo-provençal, l’ex-ministre-président wallon et ancien bourgmestre
socialiste de Charleroi, Jean-Claude Van Cauwenberghe, est actuellement au
centre de diverses procédures judiciaires. Demande de renvoi devant la Cour d’appel,
à Liège. Poursuite d’autres enquêtes, à Charleroi. Pris en tenaille, Van Cau?
L’homme crie à l’acharnement.
Mais quels sont donc les cinq dossiers judiciaires pour
lesquels le procureur général de Liège, Christian De Valkeneer, souhaite faire
comparaître Jean-Claude Van Cauwenberghe devant la Cour d’appel de la Cité
ardente? Le dossier «Immo Congo» et celui dit «du hall
omnisport de Beaumont» ont été cités
par La Libre Belgique. Le JT de la
RTBF a, pour sa part,
évoqué
un troisième dossier lié à des pressions qu’aurait exercées l’ex-homme fort de
Charleroi pour l’octroi d’un subside régional aux Chantiers navals de Thuin…
Sur la base de divers recoupements, Marianne Belgique peut aujourd’hui révéler la nature de ces cinq
dossiers, qui en réalité sont au nombre de… sept. Cinq font donc l’objet d’une
demande formelle de renvoi devant un tribunal, mais il faut avant ça que la
commission des Poursuites du Parlement wallon donne son feu vert.
Mais deux autres dossiers seraient toujours à l’instruction à
Charleroi. Il s’agirait du dossier «Sodexo» et de l’«affaire
Wagner». Pourquoi n’ont-ils pas rejoint Liège comme les cinq autres?
Les faits reprochés à JCVC auraient été essentiellement commis sous
sa casquette de mandataire communal de Charleroi, et non de ministre. Il n’y aurait
donc aucune raison de les transférer à Liège, où la Cour d’appel est seule
compétente pour juger les ministres – actuels ou anciens. Une version que
contesteraient les avocats de Van Cau.
Le point sur ces sept dossiers qui s’accumulent comme autant
de cailloux dans la chaussure de l’ancien ministre-président wallon. Se
mueront-ils en grains de sable ou en encombrants galets? Notez les
conditionnels et les nombreux points d’interrogation, les enquêtes au long
cours n’ayant pas livré leur verdict judiciaire et la présomption d’innocence
étant de mise.
1. Dépenses douteuses en Chine
Le pitch. Van Cau
aurait réalisé des dépenses douteuses lors d’un voyage officiel en Chine. Il s’agirait
d’une
mission économique réalisée en novembre 2004 en compagnie du Prince Philippe, du
ministre fédéral de l’Economie Marc Verwilghen, de la ministre flamande de l’Economie
Fientje Moerman, et du ministre-président de la Région bruxelloise Charles
Picqué. Une mission hors normes de huit jours, forte de 500 personnes
représentant quelque 200 entreprises et organismes belges. Elle est passée par
Pékin, Shanghaï et Guangzhou.
La procédure. C’est
le dossier «surprise», instruit dans la plus grande discrétion.
2. Fournitures de mobilier au gouvernement wallon
Le pitch. Le
parquet
soupçonne Jean-Pierre Paquet, ami et architecte de Van Cau, d’avoir surfacturé des
fournitures de mobilier à l’Elysette, siège namurois du gouvernement wallon, à
l’époque où JCVC présidait la Région. Ces surfacturations auraient été
réalisées par la SPRL Arcade, société carolo d’aménagement et de décoration gérée
par Paquet, qui fut par ailleurs un des fournisseurs de la ville de Charleroi à
une certaine époque. Van Cau s’est exprimé
par voie de presse sur ce dossier : il s’agit à ses yeux d’un
«faux dossier» et il déplore
un
«acharnement» du
parquet de Charleroi à son égard.
La procédure. Le
dossier a été mis à l’instruction début juillet 2009 chez le conseiller Philippe
Gorlé de la Cour d’appel de Liège, faisant office de magistrat instructeur.
3. Chantier de Thuin
Le pitch. Le
magasin Optique Point de Mire de Thuin fait partie d’une chaîne de magasins de
lunettes appartenant aux Mutualités socialistes de Charleroi. Jean-Claude Van
Cauwenberghe était administrateur de la chaîne et président des Mutualités. On
lui reprocherait d’avoir
négocié des marchés à des conditions préférentielles en échange de petits cadeaux.
Son ami entrepreneur Michel Vandezande aurait ainsi
obtenu un chantier à Thuin contre de menus travaux réalisés gratuitement. Pour Van
Cau, la justice se fourvoie, et toute cette affaire ne serait que du vent.
La procédure. A l’instar
du dossier «fournitures de mobilier», l’instruction a démarré en
juillet 2009 à Liège.
4. Hall omnisports de Beaumont
Le pitch. JCVC
est suspecté d’avoir pesé de tout son poids politique pour l’attribution d’un
contrat à son ami entrepreneur Michel Vandezande. Il s’agit de la fourniture
clé sur porte d’un hall sportif sur le territoire de Beaumont, au sud de
Charleroi. Vandezande est le patron d’une entreprise de construction souvent
choisie par l’ex-majorité absolue socialiste au pouvoir dans la Métropole.
La procédure. Van
Cau a été
inculpé
de corruption passive en avril 2010 par le magistrat instructeur Philippe
Gorlé de la cour d’appel de Liège. Ses avocats ont toujours considéré que la perquisition
menée à son domicile en juin 2008 était illégale. Pour l’anecdote, c’est lors
de cette «visite» qu’une lettre avait été exhumée derrière un
tiroir de sa table de nuit. Le roi de l’immobilier carolo Robert Wagner, un
autre favori du pouvoir de l’époque, suggérait à son ami politique de… lui
rembourser un
voyage aux Maldives (voir
l’affaire Wagner ci-dessous).
5. Immo Congo
Le pitch. En
2004, la représentation internationale de la Région wallonne et de la
Communauté française avait besoin d’être logée dans un nouvel immeuble à
Kinshasa. Un marché public avait été lancé afin de désigner une entreprise
belge chargée de prospecter le marché immobilier local. Dans ce dossier, Van Cau
serait suspecté de manœuvres ayant permis de désigner, en cours de route, un
autre soumissionnaire figurant parmi ses amis, le réviseur d’entreprise Daniel Lebrun. Et cela à la
place de celui initialement retenu.
La procédure. Ce
dossier avait déclenché une
information judiciaire au parquet de Charleroi, en octobre 2006. Il a été
soumis aux fourches caudines d’une commission d’enquête parlementaire plutôt
accommodante, fin 2006. Puis transmis à Liège en 2009, et mis formellement à l’instruction
récemment, semble-t-il.
6. Repas scolaires Sodexo
Le pitch. En 2003,
la firme Sodexo est chargée de fournir 740 repas quotidiens aux élèves de l’enseignement
communal de Charleroi. Mais un bon tiers des écoliers préfèrent les tartines aux
dîners Sodexo, ce qui ne permet pas à la firme de rentrer dans ses frais. Jean-Claude
Van Cauwenberghe, qui était alors conseiller communal mais aussi
ministre-président de la Région wallonne, a
confirmé
avoir rencontré
« fortuitement »
l’un des patrons de Sodexo aux Issambres (Côte d’Azur). Van Cau y possède une
maison. Les deux hommes auraient partagé… un repas au restaurant. Selon l’enquête,
un arrangement aurait été trouvé pour « compenser » le manque à
gagner de Sodexo en permettant à l’entreprise de surfacturer les repas
scolaires livrés.
La procédure. Van Cau a été
inculpé
pour corruption passive et escroquerie en octobre 2011. Il nie totalement les
faits qui lui sont reprochés et parle d’acharnement de la justice carolo. En
2008, trois autres personnes ont été
inculpées,
dont l’ex-échevin de l’Enseignement, Jean-Pol Demacq, pour détournement par
fonctionnaire public.
7. L’affaire Wagner
Le pitch. L’affaire
concerne les liens intenses entre l’homme d’affaires Robert Wagner et son ami
politique Jean-Claude Van Cauwenberghe. L’enquête judiciaire aurait retracé
tous les épisodes d’une ascension en parallèle. L’un dans le business
immobilier. L’autre en politique. De la construction d’un centre commercial sur
un terrain industriel, obtenu à bas prix et via une procédure d’octroi de
permis douteuse, à l’acquisition par Van Cau d’une maison vendue… à bas prix
par la famille Wagner, à la côte d’Azur.
La procédure. Une
instruction a été ouverte à l’été 2008 à Charleroi. Jean-Claude
Van Cauwenberghe n’aurait pas été inculpé. Mais il s’agit d’un dossier
«blanchiment», pour lequel la prescription est extensive.
David Leloup